Montpellier : la dure réalité des bidonvilles, Midi Libre

Par Guillaume Richard, Midi Libre du 15.12.2019

En marge de la ville, des centaines de personnes survivent depuis des années dans des habitats très précaires. En espérant bénéficier un jour d’un vrai logement. Mais c’est compliqué…

En toile de fond, les immeubles de Port-Marianne. Au-dessus, une ligne électrique à haute tension. En contrebas, l’A709 et son flot de véhicules. Bienvenue au mas Rouge, bidonville qui a vu le jour il y a un peu plus de quatre ans, sur un terrain privé. Et dont les habitants sont expulsables à tout moment.

«Mais ici, au moins une personne travaille dans 60 % des ménages, explique Catherine Vassaux, directrice de l’association Area (Association recherche éducation action) qui intervient deux fois par semaine sur le site. Presque tous les habitants ont fait une demande au SIAO(Service intégré d’accueil et d’orientation). Mais beaucoup n’ont pas obtenu de réponse. » « Ça fait quatre ans que j’ai fait les démarches nécessaires pour avoir un appartement et j’attends toujours », explique justement Danut, 32 ans, qui a vécu en caravane dans quatre bidonvilles de Montpellier pendant dix ans.Travailleur dans le bâtiment, il a décidé de construire sa maison sur le site, entre deux caravanes. « Je ne pouvais plus attendre. On s’y est mis à sept ou huit pendant un mois et demi », explique ce père de quatre enfants. Sa femme Catalina en attend un cinquième.

Comme dans les autres bidonvilles, la grande majorité des habitants survit sous un abri précaire adossé à une caravane. Pour Sorin, 27 ans, sa femme et leurs trois petits enfants, l’attente d’un appartement dure depuis
deux ans. Dans sa caravane « achetée 200 € sur le Bon coin à Vendargues », la vie est très dure. Il faut se protéger de la chaleur l’été et du froid l’hiver, de l’humidité aussi. Il faut aussi composer avec les pannes de
courant. Et malgré la propreté, les cafards et les rats pourrissent la vie de la famille…

Comme le travail, l’école favorise la mixité.

En cette fin d’après-midi, les enfants rentrent des écoles du quartier (Chengdu, André-Malraux, Michel-de-l’Hospital). Certains se joignent aux petits et aux mamans participant à l’atelier jeux et coloriage animé par Mireille, qui accompagne une centaine de personnes pour l’Area. Les enfants souffrent parfois du regard jeté sur eux. « Ton père fait les poubelles », a entendu l’une. «Moi, j’aime pas les Roumains», a encaissé l’autre. Mais comme le travail, l’école permet une mixité des publics. « Cela donne un recul sur les conditions de vie dans le bidonville et pousse les habitants à demander un logement. Ce sont les jeunes qui nous sollicitent le plus », témoigne Catherine Vassaux.

Une jeune femme de 18 ans tient un enfant dans ses bras. Elle vit désormais dans un appartement, place Carnot. « Je reviens ici voir mes parents. J’avais 10 ans quand je suis arrivée en France. J’ai grandi dans plusieurs bidonvilles. » La nuit tombe sur le mas Rouge. Des ados reviennent d’une partie de foot. La musique
s’échappe d’une voiture garée à l’entrée du bidonville, l’endroit où l’on se croise. Et où l’on partage ses rêves d’ailleurs…


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