Montpellier : Un répit de six mois pour le Mas Rouge – La Marseillaise

Juste avant l’audience du 24 novembre 2016. Photo archives HG

Juste avant l’audience du 24 novembre 2016. Photo archives HG

Le Tribunal de grande instance a ordonné l’expulsion des 130 habitants du bidonville au 1er août 2017.Une décision en demi-teinte pour permettre aux familles de s’organiser et mettre les collectivités compétentes au pied du mur.

C’est une surprise pour les avocats, l’association Area qui les accompagnent et les habitants du camp qui se trouve au Mas Rouge, dans le quartier d’Odysseum. En novembre 2014, le tribunal n’avait pas ordonné l’expulsion demandée par les propriétaires. Un peu plus d’un an après, le même tribunal leur donne six mois pour vider les lieux « au nom du respect de cette population ». « Il est à craindre qu’en cas de refus d’expulsion, les collectivités compétentes laissent s’installer cette situation pendant de nombreux mois et années sans apporter aux personnes considérées une aide suffisante et concrète en terme de relogement, de soins et de réelle et durable insertion ».

Lors de l’audience, en référé, l’avocat des propriétaires avait fait valoir les risques sanitaires dus à une épidémie de la bactérie shigellose et le droit de jouir de son terrain. (Lire article du 25 novembre 2016). Les défendeurs avaient opposé la maîtrise rapide de l’épidémie, du fait du suivi de la population sur place par les associations et les démarches d’insertion entreprises depuis 2014 par ces familles, en majorité roms. 45 des 55 enfants sont d’ailleurs scolarisés.

Cette ordonnance d’expulsion dans six mois, a été reçue à la fois avec soulagement et circonspection. « C’est une décision en demi-teinte qui procède d’un raisonnement intéressant : si on ne fait rien, les pouvoirs publics ne seront jamais mis au pied du mur et n’agiront jamais pour procéder au relogement de ces familles », commente Me Elise de Foucault, avocate d’une partie des personnes concernées. Mais « dans la réalité, les pouvoirs publics ne se saisiront pas de leurs responsabilités », prévient-elle.

UNE DÉCISION À L’EFFET INVERSE

En donnant ce rendu, le tribunal a statué sur une question qui ne lui était pas posée, concernant la précarité des personnes concernées. Il précise : « Il ne peut être durablement toléré, alors que la préfecture de l’Hérault et la mairie de Montpellier sont désormais parfaitement informées de la situation du camp concerné, que la population considérée ne puisse bénéficier de conditions de vie à la limite du tolérable ».

Pourtant, l’ordonnance risque d’avoir l’effet inverse à celui escompté : « La seule et unique conséquence va être l’expulsion des familles sans relogement, l’explosion de tous les liens sociaux créés, entre les familles, avec les associations, la société civile : CAF, MLI, Pôle emploi, écoles… Tout le travail qui était en train de porter ses fruits et de permettre une sortie décente du camp est détruit », résume l’avocate.

Les habitants réfléchissent à faire appel de la décision, mais sont soulagés du délais de six mois qu’ils risqueraient de perdre dans la bataille.

Contactée, la mairie a simplement répondu, malgré les arguments du jugement : « Il s’agit d’un terrain privé. C’est à la préfecture de procéder à l’expulsion ». Quant à la préfecture de l’Hérault, à l’heure où nous écrivions cet article, elle n’avait pas encore répondu à nos sollicitations.

Hélène Gosselin