L’association AREA a mené, en 2017, en partenariat avec le laboratoire d’études et de recherche en sociologie et en ethnologie de l’université Paul Valéry (LERSEM) et le soutien de la Fondation Abbé Pierre la première étude menée en France sur la perception des habitant·e·s des bidonvilles par les habitant·e·s d’une grande ville. Réalisée auprès d’un effectif de 800 personnes habitant Montpellier, cette étude va à rebours des idées reçues.
Cette enquête qualitative a été réalisée par MMM. Blanc, Daffy et Rieusset, étudiants en sociologie et concepteurs des questionnaires, entre janvier et mai 2017 sur un échantillon représentatif de 800 Montpelliérains et Montpelliéraines, avec une marge d’erreur de 0,03 %.
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Les travailleuses sociales et bénévoles d’ AREA sont régulièrement interpellé·es par des Montpelliérain·e·s s’interrogeant sur la précarité dans laquelle vivent les habitant·e·s des bidonvilles et cherchant des solutions. La position de ces Montpelliérain·e·s semble très différente de celles des riverain·e·s « mécontent·e·s » ou « excédé·e·s » relayée dans la presse et utilisée par certains politiques pour justifier des politiques répressives ou l’absence de politique.
L’étude menée livre ainsi une première analyse scientifique des rapports entre ville et bidonvilles :
Seuls 55 % des montpelliérain·es identifient les « camps de roms » comme des bidonvilles. Pourtant les constructions de bric et de broc qui ont réapparu au début des années 90 s’inscrivent dans l’histoire des bidonvilles français, tels que dénoncés par l’Abbé Pierre dans les années 50.
La question migratoire semble ignorée par la majorité des Montpelliérain·e·s. La Roumanie, dont est issue la majorité des personnes qui vivent dans les bidonvilles de France est un pays d’émigration depuis la chute du bloc soviétique : le nombre de roumains et de romaines en situation d’extrême précarité ne représente qu’un pourcentage infime des roumain·es installé·s en France.
La majorité des personnes ne vivent pas de mendicité
Pourtant, les Montpelliérains et Montpelliéraines qui identifient des personnes comme « roms » sont ceux et celles qui les rencontrent majoritairement dans une activité de mendicité. La minorité Rom ne pouvant être identifiée en fonction de particularités culturelles ou de couleur de peau, c’est l’activité de mendicité qui va permettre en priorité de distinguer, rendant invisibles aussi bien les « roms » parfaitement insérés que les habitants des bidonvilles ayant une autre activité (travail salarié, au « noir », biffins…) Cette identification du Rom au mendiant, et du mendiant au « camps rom » ethnicise, à tort, la question du bidonville.
Des personnes très vulnérables peu destinataires des politiques sociales
Les Montpelliérains et Montpelliéraines identifient les « roms » comme peu bénéficiaires des politiques sociales, alors qu’ils sont avec les SDF considérés comme la population la plus vulnérable. Leurs revenus sont considérés avec raison comme faibles.
La réponse souhaitée des politiques publiques : des politiques sociales
72 % des Montpelliérains et Montpelliéraines pensent qu’il est possible d’intégrer les habitant·e·s des bidonvilles dans l’agglomération. 90 % rejettent l’expulsion comme solution. Pour les habitant·e·s de Montpellier, la réponse des politiques publiques devrait être la mise en place de politiques d’insertion, avec notamment une grande importance accordée à la scolarisation des enfants.
Cette vision positive de l’insertion des habitants des bidonvilles semble en pratique peu portée par les édiles locaux. Pourtant, sur les bidonvilles où AREA intervient depuis maintenant 2 ans, une évolution positive et significative peut être constatée.